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Il y avait du bruit et il était curieux... mais curieux de quoi ?
De s'assurer de la sécurité ? Peut-être en aidant éventuellement les soldats à l'écharper dans le cas où ceux-ci en seraient venu aux armes, dans le but d'arrondir son pécule ? Puis pourquoi toutes ces œillades à la discrétion envers sa personne si elle ne représentait finalement aucun danger à ses yeux ?

Telles étaient les questions que Triss préférait éviter de poser ici sous peine d'atteindre un point de non-retour. A la place, une moue dubitative à l'adresse du mercenaire lui fit clairement comprendre que son explication, des plus vagues, ne l'avait guère convaincue et encore moins endormie sa méfiance naturelle... avant d'elle aussi passer à autre chose, particulièrement à des éléments moins sujets à débats. En plus d'être davantage enclins à la raillerie "entre collègues" !

« Bien d'accord avec vous » avait donc acquiescé la Tieffeline sur la position de Eien quant à l'importance primordiale de la pratique des armes. « Surtout qu'ils devaient êtres bons professeurs, vu qu'ils ont l'air de vous avoir vite appris que vos jambes ne servaient pas qu'à danser ! »

Frottant un de ses yeux sans pupilles afin d'appuyer son sourire railleur, puisqu'elle ne pouvait définitivement s'en empêcher plus de cinq minutes, on pouvait constater que contrairement au jeune homme, nulle cicatrice n'était visible sur la peau de la cornue. Tout du moins sur celle de son visage ou de son mince décolleté, ce contrairement à ses mains griffues barrées de nombreuses petits marques qui, elles, au contraire, laissaient suggérer un passé combatif et/ou malheureux.

« Mais trêves de plaisanteries douteuses. J'ai crû comprendre grâce à Sieur Paliso que vous faisiez également parti d'une compagnie de mercenaires ? J'en déduis alors qu'en plus de courir toute hallebarde dehors en tenue proprette, vous avez dû courir la campagne et voir les quatre coins du Margolan, peut-être même avec certains de ces soldats voulant "bien faire" ... me trompe-je ? »

En attendant une réponse qu'elle espérait un peu plus convaincante que précédemment, le regard de Triss s'était temporairement rivé sur l'arrivée récente de l'elfe, unique représentant de la fête pouvant prétendre lui tenir tête en matière de curiosités raciales du coin car autant les semi-elfes étaient relativement courant dans le Sud, autant les elfes "purs-sang"... beaucoup moins. Voire pas du tout.
Comme ici, semble t-il, à en juger par les réactions de chacun.

« En effet, c'est la première fois que je quitte la porte de Korin. Vous avez de la chance, si le soleil brille longtemps. Et toute cette verkeuf verkeufkeuf ... keuf... .. ces arbres et ces champs, je n'y suis pas habituée. Il n'y en a pas autant en ville. Si keuf .. keuf keuf..
... »
Joyanne attendit que sa quinte de toux semble vraiment passée pour demander à Lyannis de Brumelois :
« Si vous venez de l'Est, de la frontière ... cela veut-il dire que vous pouvez apercevoir le mur de glace depuis vos fenêtres ? Est-ce réellement aussi imposant et titanesque que les rumeurs le disent ? »

Loklas, après avoir saluer le roi, se tournait désormais vers le buffet. Cet étalage de mets divers et variés semblait le rendre plus curieux que le reste de l'assistance. Ignorant les conversations alentour, l'elfe curieux se met à piocher de ci de là, grignotant une bouchée par ci, un morceau plus loin... n'hésitant pas à grimacer ostensiblement lorsque la chose ne lui plaît pas, lâchant même quelques jurons elfiques à l'occasion : « Berk, ils ont demandé à tante Pétunia de mettre ses pieds dedans ou quoi ? »

« Vous ai-je fais quelque chose pour mériter de tels sarcasmes ? » Eien leva les bras et secoua la tête de droite à gauche, dans un simulacre de comédie.
Quand il regarda à nouveau Triss, c'était à nouveau un sourire qui était gravé sur son visage. Il était possible que ce sourire s'était agrandit suite aux dernières paroles de l'elfe.

« Vous devriez reprendre une coupe de champagne...
Pour répondre à votre question, je n'en sais rien, la majorité des soldats se ressemblent dans leur armure.
Rappelez vous que je n'ai jamais approuvé leur comportement, j'essaye juste d'en trouver la logique »

Lyannis eut un petit sourire triste en répondant à Joyanne, tandis que les Pontefort se permettaient un petit rictus méprisant. Le noble de l'est expliqua à Joyanne la réalité des steppes orientales.
« Nous n'avons guère de fenêtre dans les steppes... En dehors de Haute-Tour, où réside le Duc, la plupart des installations sont des fortifications souterraines, plus adaptées pour les hivers rigoureux. Et le reste n'est que campements nomade de marchands et de chasseurs...
Mais pour répondre à votre question, on peut apercevoir le mur depuis les sommets de Haute-Tour, lorsque le ciel est dégagé, mais à cette distance il n'a rien d'imposant. Néanmoins, j'ai participé à deux reprises à des expéditions au delà de la frontière, pour chasser des hors la loi et des monstres. Quand on se rapproche suffisamment, le mur devient de plus en plus omniprésent, occupant un pan de l'horizon de l'est à l'ouest à perte de vue... Mais c'est sa hauteur qui le rend vraiment inquiétant. Plus on s'approche, plus il semble grandir et nous écraser sous sa masse... »

Sur ces explications, le roi, qui avait fini de s'entretenir avec son chambellan et la musicienne, claqua dans ses mains pour attirer l'attention des convives.

« Mesdames et Messieurs, si vous voulez bien vous donner la peine de me suivre, nous allons profiter d'une petite distraction en attendant la suite du repas. »

Ce faisant, il se dirigea vers la sortie du chapiteau, accompagné par son chevalier protecteur. À son passage un des deux gardes leur emboîta le pas, tandis que l'autre continuait de surveiller l'armement déposé par les invités.

La prêtresse écouta attentivement Lyannis lui expliquer la situation. C'était très intéressant. Ce mur, Joyanne aimerait bien le voir un jour. La région n'avait pas l'air très riante, mais ce devait être une vision impressionnante. Joyanne hocha la tête un instant, en commençant à répondre.

« Les températures sous terre sont plus constantes, ou est-ce plus facile à chauffer l'hiver ? Ce doit être triste de pouvoir passer des jours sans voir le soleil. A moins que vous n'utilisiez des miroirs pour amener sa lumière, comme dans les temples de Lathandre ? »

Elle allait ajouter autre chose, quand le roi prit la parole et interpella l'assistance. Joyanne sourit et porta son regard vers Malgo et son ami Trevathien.

En fin de compte, il n'a pas eu le temps de revenir. J'espère après. J'aimerais bien rencontrer tout le monde ici. Même si certains cherchent à se rendre antipathique.

Reportant son regard sur ceux à côté d'elle, surtout les Pontefort auxquels elle venait de penser, Joyanne regarda ce qu'ils faisaient avant de suivre le groupe. Ou du moins ceux qui se déplaçaient pour rejoindre le roi.

Est-ce que la même chose se produit les autres années ? Fersel ne m'a pas dit grand chose sur le déroulé de cette fête. Lui et son goût pour les surprises, me voilà horriblement mal préparée. Je suis sûre que ça l'amuse. Hahaha. Il faudra que je trouve le moyen de lui rendre la monnaie de sa pièce.

« Oui, vous avez fait quelque chose de grave, de très grave... une daaaaame respectable telle que moi ne doit pas parler aux inconnus et je ne sais toujours pas qui vous êtes. Je suis choquée. Outrée. Outrechoquée, même. »

Bien sur, tout dans ses mots et ses gestes, beaucoup trop grandiloquents pour êtres vrais, hurlait le contraire.
Et alors que Triss était en plein débat intérieur en pesant le pour et le contre d'un énième verre, ce fut le Roi en personne qui l'avait indirectement incité à remettre ce projet ambitieux pour plus tard et donc à se montrer raisonnable dans l'immédiat. Peut-être pour la première fois de sa vie, d'ailleurs.

« Ah... le champagne attendra : la fête continue ! »

Regardant d'abord Eien puis les quelques connaissances qu'elle s'était faite jusqu'à présent, la Tieffeline avait reculé d'un pas suite à l'invite du souverain. Elle suivrait le flot des invités, qui n'allait pas tarder à se regrouper, une fois le moment venu.

Ayant entendu l'annonce royale, Loklas repose ou il peut les quelques friandises qu'il avait encore en main et se dirige avec entrain vers l'extérieur du chapiteau. Passant devant le garde aux tonneaux le visage souriant de l'elfe s’assombrit soudain, il fixe son arc d'un regard insistant et lève des yeux d'un noir de tempête sur le soldat. Son regard est si expressif que le garde croirait presque entendre dans sa tête un message du genre : Si mon arc a la moindre égratignure, je t'arrache les yeux, je les mets dans les petits fours et je les jette aux chiens !

Le garde se redressa imperceptiblement sous le regard de Loklas, comme prit en défaut par un supérieur lors d'une inspection.
Il soutint néanmoins le regard de l'elfe le temps que celui ci passe devant lui, rapidement suivi par les deux Pontefort, visiblement intrigués par cette interruption dans la soirée. Suivirent Kroburk, puis le groupe de Trevathiens, accompagné d'un Malgo Paliso qui semblait soudainement soucieux...

Joyanne suivit tout le monde, surtout ceux qui suivent le roi.

Guidés par sa royale majesté, Markus 1er, les participants remontèrent l'allée de gravillons blanc, pour arriver sur une terrasse aménagée au bord du petit plan d'eau du manoir. Les cygnes, canards et oies qui nageaient paisiblement lors de l'arrivée des convives avaient disparus, laissant la place à une centaine de minuscules embarcations transportant chacun une bougie. Devant le plan d'eau, en contrebas de la terrasse, la rousse musicienne avait commencé à jouer de la harpe de manière discrète, donnant à la scène une ambiance mystique...

Le roi invita d'un geste les convives à s'installer sur les banquettes prévues à cet effet, faisant face au spectacle. Décidé à montrer l'exemple, il s'installa confortablement au premier rang, rapidement imité par Jans et Vanys Pontefort, désireux de satisfaire les royales demandes ...

« Eien. Eien Sarno, pour vous servir » répondit le mercenaire dans une révérence après le speech de Triss.

Puis, il attendit patiemment que tous les membres présents dans la salle la quittent pour faire de même, tout en gardant précieusement son regard fixé sur les tonneaux qui contenaient les armes de tout le monde. Il souhaitait vérifier que personne n'en récupère une, et souhaitait jeter un dernier regard sur sa hallebarde avant de quitter le banquet.

Il profita ensuite du chemin pour retourner à côté de la tieffeline et lui susurra à l'oreille Arrivé sur la terrasse, Eien s'assit sur la banquette derrière le roi.